Avant de revenir de façon plus précise à ce qui conduit la France et l'Europe vers le pire, j'entends ici apporter des précisions qui seront aussi des réponses globales à mes lecteurs.
1. Je ne me définis en général jamais comme "phobe" ou " phile", surtout lorsqu'il s'agit d'un pays, car je me méfie des définitions simplistes. Je ne suis pas "francophobe" : j'analyse ce que
la France devient, et ce qui la détruit où l'enferme dans des cercles vicieux, et j'essaie de proposer des réponses. Force m'est de constater certains faits : ainsi, ce qui a fait de 1789 une
révolution désastreuse.
Mes analyses, là, sont proches de celles d'historiens nombreux qui vont d'Alfred Cobban à Georges Gusdorf. Je ne suis pas "europeophobe" : j'analyse la construction européenne, et je note ses
défauts de fabrication qui sont ceux inhérents à ce que Friedrich Hayek appelle le constructivisme. Je dis que le constructivisme mène au pire, et je constate ce qui survient présentement en
Grèce, en Espagne, au Portugal, en Irlande, etc. Je ne suis pas "americanophile" : je connais l'histoire des Etats Unis et la société américaine. Je sais sur quelles valeurs se sont fondés les
Etats Unis, et je sais ce qu'ils incarnent jusqu'à ce jour. Je connais tous les soubassements de ce qu'on appelle l'anti-américanisme. Je critique les Etats Unis quand ils sont dirigés par un
Obama, et j'explique pourquoi. J'approuve davantage les Etats Unis dirigés par un Reagan ou un George Walker Bush, et j explique aussi pourquoi. Jean François Revel a écrit un excellent livre
appelé " L'obsession
anti-américaine*
" et j'en recommande vivement la lecture. Je ne suis pas "israëlophile" : je connais l'histoire et la réalité d'Israël, je sais ce qu'incarne Israël, et s'il y a un pays qu'on doit défendre
contre la haine et le mensonge, c'est bien, aujourd'hui, celui là.
2 Si je dois me définir intellectuellement, ce que je fais le moins possible, car je
ne veux pas m'enfermer dans des catégéories
closes, je me dirai libéral classique, jurisnaturaliste et conservateur, tendance néo-conservatrice. Je suis libéral classique au sens ou économiquement, le libre marché, le
libre hange et la libre entreprise me semblent le
meilleur mode de création de richesse et de prospérité dans le respect de la liberté et de la dignité de l'être humain. Les analyses économiques les plus fécondes et les plus pertinentes
aujourd'hui sont, à mes yeux, celles de Hayek, Mises, Israël Kirzner, Gary Becker, Thomas Sowell, George Gilder et, en France, Pascal Salin. Je suis jurisnaturaliste au sens où je pense que
sans l'idée de droit naturel, la défense et l'affirmation des droits de l'être humain s'anéantissent. Mes références, là, vont de John Locke à Leo Strauss. Je suis conservateur au sens où je
pense que ce qui fait la grandeur et la fécondité de la civilisation occidentale vient des valeurs éthiques issues du judaïsme et reprises par le christianisme : respect de la dignité de l'être
humain en tant qu'être doué de raison, refus du mensonge, du vol, du viol, du meurtre, respect de la liberté de choix et de passer contrat, prise en compte de ce qu'en deçà des multiples
contrats du présent, il existe un grand contrat qui implique de comprendre pourquoi il existe ce que Russell Kirk appelle des choses permanentes telles que la famille. Je suis néo-conservateur
au sens où je pense que l'idée de dignité de l'être humain vaut pour tous les hommes, qu'il existe un devoir d'ingérence dans les pays ou des dictateurs massacrent et exterminent, et que des
valeurs éthiques fondées sur la démocratie et les droits de l'homme doivent guider la politique étrangère et pour cela reposer sur des forces armées efficaces. Je ne suis un adepte ni du
cynisme ni du relativisme disant que les valeurs fluctuent au gré du vent et des inclinations subjectives : le cynisme mène souvent à excuser ou justifier le pire, le relativisme aussi.
3. Enfin, je reviendrai sur mon parcours dans des livres à paraitre, mais je tiens à dire ici que je pense qu'il existe une éthique du travail intellectuel. Et je me tiens, autant que possible,
à cette éthique, qui implique pour moi de me situer sur le terrain de la connaissance, de ne pas mentir, de ne pas édulcorer et de ne pas transiger. Cette éthique m'a fermé les portes de grands
journaux, d'émissions de télévision et de radio, de maisons d'édition. Elle m'a conduit à considérer que je devrais sans doute renoncer tôt ou tard à écrire en français, car le boycott que je
subis me devient insupportable. Elle m'a conduit à ne pas écrire plusieurs livres dont j'avais le projet. Elle m'a conduit à être harcelé, persécuté, chassé. Mais je n'ai pas transigé. Si, pour
publier plus largement ou parler davantage à la télévision où à la radio en France, j'avais du biaiser où me soumettre au conformisme ambiant, je ne l'aurais pas fait, et je ne l'ai d'ailleurs
pas fait. Tout discours disant que j'aurais " raté " ceci ou cela est inepte : c'est si j'avais biaisé ou si je m'étais soumis que j'aurais raté. C'est la France qui, en laissant régner une
police de la pensée qui stérilise tous les débats et qui, en empêchant de facto la circulation d'idées considérées comme fécondes dans les sociétés les plus libres et les plus prospères de la
planète, rate son devenir et s'enferme vers le naufrage.
Reproduction autorisée avec la mention suivante et le lien vers cet article :
* en achetant le livre avec ce lien, vous bénéficiez d'une remise de 5%, et vous soutenez Drzz qui reçoit une commission de 5%
.
À propos de Guy Millière
Guy Millière, (spécialisation : économie, géopolitique). Titulaire de trois doctorats, il est professeur à l'Université Paris VIII Histoire des cultures, Philosophie du droit, Economie de la
communication et Maître de conférences à Sciences Po, ainsi que professeur invité aux Etats-Unis. Il collabore à de nombreux think tanks aux Etats-Unis et en France. Expert auprès de l’Union
Européenne en bioéthique, Conférencier pour la Banque de France. Ancien visiting Professor à la California State University, Long Beach.Traducteur et adaptateur en langue française pour le site
DanielPipes.org. Editorialiste à la Metula News Agency, Israël Magazine, Frontpage Magazine, upjf.org. Membre du comité de rédaction d’Outre-terre, revue de géopolitique dirigée par Michel
Korinman. Rédacteur en chef de la revue Liberalia de 1989 à 1992Il a participé aux travaux de l'American Entreprise Institute et de l'Hoover Institution. Il a été conférencier pour la Banque de
France, Il a participé à l'édition d'ouvrages libéraux contemporains comme La constitution de la liberté de Friedrich Hayek en 1994 dans la collection Liberalia, puis dans la collection « Au
service de la liberté » qu'il a créée aux éditions Cheminements en 2007. Il a également été rédacteur en chef de la revue éponyme Liberalia de 1989 à 1992. Il a été vice-président de l'Institut
de l'Europe libre ainsi que Président et membre du conseil scientifique de l'Institut Turgot. Il fait partie du comité directeur de l'Alliance France-Israël présidée par Gilles-William Goldnadel.
Il est l'auteur de plus d'une vingtaine d'ouvrages.