Avertissement : Je ressens, avec l'affaire Strauss-Kahn, le besoin de me fendre (et non de me défendre de quelques explications, auprès de vous, chers lecteurs de Drzz.fr.
Du grand nombre d'articles qui ont été publiés sur Drzz, au sujet de l'accusation de viol par DSK d'une femme de ménage, une partie des lecteurs m'a reproché de me joindre à la meute hurlante et au lynchage, et
une autre, de l'avoir condamné d'avance et de l'avoir privé, comme les américains en le livrant à la presse mondiale menottes aux mains, du bénéfice de la présomption
d'innocence.
A leur endroit, j'ai plusieurs réponses avant d'aborder le coeur de cet article.
Si vous y regardez de plus près, aucun de mes articles ni ceux des autres auteurs qui ont publié sur Drzz ne juge DSK. Il se trouve, hélas, que la nuance semble avoir quitté le bon sens, et que ne pas défendre DSK c'est l'accuser ! Et bien non. Je n'ai pas
défendu DSK car c'est aussi malhonnête que de le juger coupable – honnêteté dont les journalistes ne s'embarrassent pas, et les politiques encore moins.
J'ai été, je crois, le premier média à publier l'acte d'accusation brut, publication qui m'a valu les honneurs d'une interview d'une radio bretonne, et une poussée de fièvre inquiétante chez
nos hébergeurs.
Je reconnais m'être acharné, et je vais continuer à le faire. Et ceux qui ont l'oeil fin auront constaté que ce n'est pas contre DSK que je m'acharne, mais contre ce concentré de tares qui
s'est déversé sur le public en l'espace de quelques jours.
Au hasard :
Le mensonge, la mauvaise foi, la désinformation, l'anti-américanisme primaire, la passion du complot – qui vient toujours au secours de ceux qui sont à cours d'arguments, la méprisante
suffisance des élites qui exigent l'universalité d'un statut au dessus des lois, leur aveu de la haine du peuple et de ses lois égalitaires, et, par dessus tout, l'ironique refus du respect
des lois américaines sur leur propre sol, par beaucoup de ceux qui refusent la Sharia sur le notre.
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Strauss Kahn menotté renvoi une image humiliante. Une image qui induit l'idée de culpabilité.
Le Maire de New York le reconnaît lui-même : "je
pense que c'est humiliant (de se retrouver les menottes aux mains à la une des journaux). Mais si vous ne voulez pas vous retrouver à marcher comme un délinquant (entre deux policiers), ne
commettez pas le crime ! Je n'ai aucune sympathie pour ça. Et notre système judiciaire est ainsi fait que le public peut voir les auteurs présumés".
La pratique n'est constitutionnelle que si elle sert un objectif précis, que précise deux ex-représentants du Ministère public dans le National Law Journal.
"L'exhibition publiquement de personnes célèbres, menottées devant les caméras de télévision, poursuit plusieurs objectifs", expliquent-ils.
- d'une manière générale, cela sert à informer le public des efforts que déploie le Ministère public – qui le représente, dans l'accomplissement de son travail.
- cela rappelle avec force au public que personne n'est au dessus des lois, et surtout pas les riches et les puissants, opinion toujours prête à se développer à la vitesse de la lumière. Cela
le rappelle aussi, et c'est encore plus important, aux grands de ce monde qui se prendraient à fantasmer que leur puissance les place au dessus des lois.
- s'agissant de personnes en vue, dont la réputation est une part importante de leur capital, elle a un effet dissuasif fort : les autorités américaines recensent de nombreux cas ou les
coupables se sont dénoncés à la Police pour justement éviter ces humiliantes séances.
- cela peut encourager des personnes qui détiennent des informations à les révéler aux enquêteurs.
- Et pour terminer, le point le plus sensible, c'est qu'il met une pression incroyable pour inciter l'accusé à coopérer avec la justice.
En revanche, dans le cas ou l'accusé se révèle innocent, les dommages sont particulièrement dévastateurs, raison pour laquelle les représentants de l'ordre américain ne manient cette pratique
que lorsque les suspicions de culpabilité sont très fortes.
Strauss Kahn est loin d'avoir reçu un traitement "de faveur" et de nombreux cols blancs américains ont eu droit à la promenade menottée. Si la France souhaite vraiment refaire surface sur la
scène internationale, elle doit s'habituer à accepter les règles des pays où elle pose les pieds.
A propos, celui-ci n'a jamais soulevé l'écoeurement des médias, personne n'a réclamé pour lui le bénéfice de la présomption d'innocence, et s'il a baisé tout le monde, il n'a violé
personne.
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© Jean-Patrick Grumberg pour Drzz.fr